Les théâtresd’opérations se suivent mais ne se ressemblent pas. Après être intervenu en Turquie l’hiver dernier après le séisme, l’adjudant chef Éric Frias, pompier professionnel à Bagnols-sur-Cèze depuis 2000 et volontaire à la caserne d’Uzèsdepuis 2004, s’est envolé le 28 septembre 2023 en direction de Derna (Libye) trois semaines après les inondations qui avaient dévasté la cité balnéaire. Une catastrophe qui a causé la mort de plus de 11 000 personnes d'après les derniers bilans.
C’est en compagnie de 92 personnes, issues de différents corps de métiers que le soldat du feu gardois est parti au sein de l’Escrim (Élément de sécurité civile rapide d’intervention médicale). Aérotransportable, l’Escrim intervient dans le cadre des missions internationales de secours d’urgence. "J’ai essayé pendant neuf ans de rentrer au sein de l’Escrim, se souvient Éric Frias. C’est une petite unité avec peu de place. Et il faut avoir un profil polyvalent, multitâche et psychologiquement stable car on fait face à des situations de catastrophe". Finalement, il parvient à l’intégrer. Depuis, les opérations se succèdent.
Aider à tout prix
Éric Frias est parti à Derna du 28 septembre au 15 octobre 2023 pour une mission d’une quinzaine de jours. L’objectif ?
Relever la première escouade arrivée sur place quelques jours après la catastrophe naturelle. Compte tenu de l’instabilité politique dans le pays, le détachement est parti en compagnie de gendarmes et d’un petit groupe du GIGN. "C’était une première pour mois mais c’était indispensable pour garantir notre sécurité". Sur place, l’équipe de l’Escrim était confinée au sein du camp. "Les conditions de vie, c’est un peu roots, on mange des rations militaires, on dort sur des lits de camps. Mais ces conditions, ça soude énormément une équipe. Il y avait une très belle symbiose entre les unités sur place".
En tant que logisticien, le volontaire uzétien avait à sa charge le démontage de l’hôpital de campagne. Mais entre-temps, Éric Frias a troqué sa casquette de logisticien pour celle d’auxiliaire sanitaire. "On supplée les infirmiers et on devient en quelque sorte des aide-soignants. Toute l’année, pour être opérationnel, on s’entraîne pour faire des perfusions, poser des plâtres".
Au quotidien, le détachement de l’Escrim était épaulé par des interprètes francophones. "Ils nous ont beaucoup aidés. Ils sont venus alors que certains avaient perdu des membres de leur famille dans les inondations". Face à l’équipe médicale, les habitants de Derna étaient particulièrement marqués aussi bien psychologiquement que physiquement. Dans les blocs opératoires temporaires, les chirurgies et les amputations se succédaient et tout devait être réalisé dans le respect de la religion islamique. "Les familles récupéraient les membres amputés. C’était très important pour elles de les conserver", se remémore Éric Frias.
Se sentir utile
Face à ces conditions dramatiques, la cohésion et le besoin de se sentir utile priment. "Notre volonté, c’est de porter assistance aux sinistrés. Nous apportons du réconfort pour que les populations ne se sentent pas oubliées". Pour Éric Frias, sa fonction au sein de l’Escrim est complémentaire avec sa profession de sapeurs-pompiers. "Le métier de pompier m’a forgé, il m’a appris à me protéger. Quand je suis pompier, je prends en compte une situation, on transporte la victime vers les hôpitaux et c’est tout. On n’a plus de nouvelles après. À travers mon activité de volontaire, je suis des personnes tout au long de leur séjour à l’hôpital de campagne. Il y a un affect, on compatit énormément".
Éric Frias et son détachement sont finalement rentrés en France le dimanche 15 octobre. "La mission a été classée comme très positive. Nous nous sommes sentis utiles", conclut celui qui a aujourd’hui retrouvé son habit de pompier professionnel.